1878 - 1934 LA BOURSE DU TRAVAIL de TOULOUSE

, par udfo31

Le résumé historique de la Bourse du Travail et de l’Union des Syndicats de la Haute-Garonne, est la reproduction intégrale d’une brochure qui fut éditée en 1934. ARCHIVES MUNICIPALES B 3542.

Il s’agit bien là de l’histoire du mouvement syndical que continue aujourd’hui la CGT-FORCE OUVRIERE.

A cette époque, la C.G.T. , avec à sa tête Léon Jouhaux, était dans la lignée de la Charte d’Amiens, qui en 1906, avait défini l’indépendance du mouvement Syndical vis-à-vis des courants politiques. Les communistes, quant à eux, appliquèrent les vingt-et-une conditions de Moscou, c’est à dire, l’intégration des syndicats dans l’appareil du Parti : Ils avaient créé la C.G.T.U., lors du Congrès de Lille en 1921 ce sera la première scission syndicale

La réunification, au Congrès de Toulouse, en 1936, sera de courte durée. Le 23 août 1939, à l’annonce du Pacte Germano-soviétique, les communistes refusèrent de désapprouver ce pacte qui représentait un danger éminent pour les démocraties Européennes. Ce fait est la cause de la deuxième scission syndicale.

En 1940, les armées hitlériennes envahirent la France : la défaite fut rapide ; l’Etat-Major devait se replier sur Vichy, le gouvernement à Bordeaux.

Robert Bothereau, Secrétaire et une partie du Bureau Confédéral, s’installeront à Toulouse au début de juillet 1940. Un Comité Confédéral restreint se réunira dans notre Cité le 20 juillet : il regroupera 24 Fédérations et 28 Unions Départementales.

Parlant de son « séjour » à Toulouse, Robert Bothereau écrit, dans son récit « Le syndicalisme dans la tourmente-1940-1945 » « …Nous préparions notre résistance. Celle d’abord de la lutte pour la survie du syndicalisme que Vichy mettait en cause et qu’il allait mettre en péril. »

Face à l’occupant nazie et au régime de Vichy, notre syndicalisme s’organise dans la clandestinité et donne naissance à « RESISTANCE OUVRIERE, qui deviendra plus tard « FORCE OUVRIERE »

LA BOURSE DU TRAVAIL DE TOULOUSE Et L’Union des Syndicats de la Haute-Garonne 1878-1934

La région toulousaine a toujours connu l’organisation ouvrière. Nous ne parlons pas de l’époque des anciennes corporations, maîtrises et jurandes. Ni des mouvements ouvriers importants dans le courant du XIX siècle dont les deux principaux furent caractérisés par deux grèves générales à Toulouse : l’une en 1811 pour l’augmentation des salaires, l’autre en 1867 pour la réduction de la journée du travail à dix heures. On faisait alors treize, quatorze, quinze heures.

Ainsi, sous le Second Empire(comme sous le Premier) il y avait des syndicats ouvriers à Toulouse. Au cours des années qui suivent, ces syndicats s’unirent localement, et voici à quelle occasion principale : En 1878, au retour des délégués ouvriers de Toulouse à l’exposition universelle, lesquels avaient eu l’occasion de nouer des relations avec les militants parisiens du mouvement social ; le citoyen Chabert, graveur sur métaux, conseiller municipal de Paris, vint dans la capitale du Languedoc, faire comprendre dans une réunion qui eut un grand succès, les avantages économiques qui existaient pour la classe ouvrière toulousaine, d’une union locale de syndicats dans une Bourse du Travail. A la suite de cette conférence qui eut un fort retentissement, les camarades d’Hébrard, lithographe, et Tranier, tailleurs d’habits prirent l’initiative du regroupement demandé qui établit d’abord son siège à la salle du cours municipal d’espagnol(aujourd’hui disparu) rue d’Alsace-Lorraine et rue du Salé, puis au 10 bis allées Lafayette(aujourd’hui allées Jean Jaurès), ensuite rue Constantine.

En 1890, la Bourse du Travail de Toulouse créée ainsi en 1878,était installée rue des Couteliers, 5.

Le dimanche 12 juillet 1892, avait lieu l’inauguration de la nouvelle Bourse du Travail, place Saint-Sernin et rue Merly. Ce fut une belle cérémonie au milieu d’un grand concours de travailleurs et délégués ouvriers de Carcassonne, Montpellier, Cahors, Grisolles. Le maire présidait entouré de ses adjoints, parmi lesquels Jean Jaurès. Quand le maire remit au secrétaire de la Bourse du Travail, les clés du nouvel immeuble et se préparait à se retirer pour laisser continuer la fête en famille, une manifestation se produisit. Toute l’assistance réclama Jaurès avec une telle insistance, que celui-ci fut obligé de monter à la tribune. Le discours de Jaurès, magnifique improvisation, ne fut pas recueilli. Mais ses premières paroles retentirent si bien et si fort dans le cœur attentif de tous les auditeurs, que la Bourse du Travail de Toulouse en a gardé l’impérissable souvenir et elles sont gravées sur une plaque fixée dans la grande salle de réunion, sous le buste du Grand Homme.

Jaurès appelé à la tribune avait commencé ainsi : J’estime qu’il ne faut pas que les paroles soient vaines. C’est une arme de combat dont il ne faut se servir que pour atteindre un but déterminé.

La Bourse du Travail de Toulouse possède des archives remontant à son origine(1878) et tenue exactement à jour, ainsi qu’une bibliothèque qui n’a cessé de s’enrichir au cours des années.

Depuis sa création, elle a toujours pris l’initiative d’organiser des conférences d’éducation, toujours établi un contact(qu’elle aurait voulu permanent) entre intellectuels, professeurs et manuels, toujours eu le souci de former et développer les militants, toujours attiré et retenu chez elle de la jeunesse ouvrière de laquelle sont sortis ses cadres et la plupart des cadres de ses syndicats adhérents.

Les cours professionnels de la Bourse du Travail, dans sa structure actuelle, datent de 1890 ; Ils n’ont cessé depuis le début de prendre une ampleur continue et de répondre au besoin d’instruction générale et d’instruction professionnelle qui se fait sentir vivement dans la jeunesse ouvrière à Toulouse

Pour l’année scolaire 1933-1934, les cours professionnels de la Bourse du Travail de Toulouse totalisent 542 élèves ; 469 jeunes hommes et 73 jeunes filles donnant un ensemble de 425 apprentis, 65 employés, 52 écoliers. Leur âge ? 84 de 13 ans, 102 de 14 ans, 86 de 15 ans, 108 de 16 ans, 70 de 17 ans, 48 de 18 ans, et 43 au-dessus.

Ils suivent les leçons de 23 professeurs donnant ensemble 92 heures de leçons par semaine, dans des cours du soir, entre 18 heures et 22 heures, que suivent 490 élèves, et, pendant la journée, suivient par 52 élèves. Ces professeurs, tous syndiqués, mandatés par leur syndicat, reçoivent Une vacation de 12 francs pour deux heures de leçons.

Voici les matières enregistrées : dessin graphique, industriel d’ornement à tous les degrés ; industrie du fer et du bois ; tracé de charpente, architecture du bâtiment, stéréotomie ; taille de briques(maçonnerie toulousaine), pierre, marbre ; tracé de coupe, habillement(hommes et dames) ; sténographie ; français ; calcul ; mathématiques ; ajustage et serrurerie ; électricité ; solfège.

Les cours professionnels de la Bourse du Travail de Toulouse ont toujours été en progrès depuis leur constitution. Voici leur statistique numérique dans ces dernières années : 1929, 617 élèves ; 1930, 615 ; 1931, 603 ; 1932, 536 ; 1933, 542. Ils sont dirigés par le secrétariat de la Bourse du Travail, surveillés et contrôlés par un conseil de sept administrateurs désignés dans son sein par la commission exécutive, de l’U.D.

Les subventions du sous-secrétariat à l’enseignement technique, du Conseil Général de la Haute-Garonne, du Conseil municipal de Toulouse, de la Chambre de commerce, du Conseil des Prud’hommes, de l’Union départementale, assurent les dépenses consistant dans les vacations des professeurs, dans l’attribution des prix, qui consistent en outillage remis aux élèves, qui reçoivent aussi gratuitement, pendant la durée des cours, d’octobre à fin avril, toutes les fournitures scolaires.

Les militants toulousains ont constamment eu le souci de l’autonomie syndicale. Aucune influence extérieure de quelque nature qu’elle fût, étrangère au mouvement ouvrier syndical, n’a pu s’exercer et par conséquent gêner l’action de la Bourse du Travail de Toulouse. Qui a toujours le respect et la considération des municipalités de diverses nuances politiques qui se sont succédées au Capitole( ainsi appelle-t-on l’Hôtel de Ville toulousain). Les services de la Bourse du Travail de Toulouse ont toujours été en correspondance avec les recherches et les réalisations de l’action sociale, en tout ce qui concerne la défense du travail au point de vu législatif, prévoyance, assurance. Dans la période d’avant guerre, le Conseil judiciaire et les consultations médicales de la Bourse du Travail de Toulouse, avaient créé un cours de législation sociale à l’usage des militants locaux. Ce cours se continue présentement par des conférences. Les difficultés sans cesse accrues de l’existence, par la suite du renchérissement de la vie, ont provoqué à la Bourse du Travail l’établissement d’un économat qui fonctionnait avant et pendant la guerre et qui reconstitué vers 1923, a pris un remarquable développement. Dans tous le cours des ans, depuis 1890, la Bourse du Travail de Toulouse a été le siège de la tenue de nombreux congrès de fédérations. Il faut noter qu’elle fut le siège du deuxième congrès de la Fédération des Bourses du Travail de France et des Colonies, du 12 au 15 février 1893 ; du sixième congrès de cette Fédération, du 15 au18 septembre 1887. du troisième congrès de la Confédération Générale du Travail, du 20 au 25 septembre 1897. A Toulouse, salle des Jacobins, rue Pargaminières, se tint an 1910, le onzième congrès de la Confédération Générale du Travail.

La Bourse du Travail de Toulouse s’est toujours confondue avec l’Union locale des syndicats toulousains. Il en est de même à ce jour et son immeuble abrite le siège de l’Union Départementale de la Haute-Garonne.

Depuis sa fondation,en 1878, depuis 1890, date du commencement de sa marche normale, régulière, l’Union des Syndicats ouvriers de Toulouse avait établi la base de sa propagande, le motif principal de son recrutement, dans la question du relèvement des salaires qui fut pendant les dix ans qui suivirent, la préoccupation constante des syndicats la composant.

En 1901, les maçons de Toulouse, par une grève remarquable qui dura du 21 au 22 juillet, arrachèrent à leurs entrepreneurs en un contrat resté fameux, un minimum de salaire, établirent la journée de dix heures de mars à octobre et la journée de neuf heures de novembre à février.

Ce contrat provoqua l’attention de toutes les corporations dont la moindre journée étaient de onze et dix heures, et les militants des organisations syndicales se rendirent compte que si l’augmentation des salaires était une revendication immédiate importante, la diminution des heures de travail sans diminuer le taux des salaires constituait un sérieux appoint dans le relèvement des salaires.

De 1901 à 1906, les Syndicats toulousains basent leur action de propagande, de recrutement, de revendications, à la fois sur le relèvement des salaires, la diminution des heures de travail, la suppression du travail aux pièces.

Dans cette période de cinq ans, les Syndicats enregistrent dans leurs mouvements de grève des demi-succès, qui l’emportent sur le nombre de défaites ou des résultats nuls, et des améliorations dans les conditions de travail sont conquises.

En 1906, c’est la journée de huit heures( d’après la décision de Bourges de 1904) que marche le prolétariat toulousain. Du 1er janvier au 31 décembre de cette année, et pas seulement aux approche du Premier Mai historique, l’Union des Syndicats entretint une agitation intense à Toulouse. Toutes les corporations entrèrent plus ou moins dans cette agitation et nombre de Syndicats purent enregistrer des améliorations dans les conditions de travail, soit après avoir été forcés à la grève, soit des pourparlers avec le patronat aboutissent à une entente.

En 1907, l’agitation de l’année précédente se poursuit, mais avec une raison de plus qui y fut introduite par décision de l’Union prise dans sa séance du 20 février. Cette raison était le chômage, qui frappait d’autant plus rudement les travailleurs toulousains que la vie renchérissait brusquement et que le problème de la vie chère commençait à s’imposer à l’attention de tous les militants.

Ainsi, la suppression du travail aux pièces, le relèvement des salaires, le chômage furent les questions pressantes de la vie ouvrière qui, depuis 1901, firent valoir aux Syndicats de Toulouse, à leur Union, toute la nécessité sociale d’une diminution des heures de travail.

Plusieurs syndicats parmi lesquels les Maçons et les Employés constituèrent une caisse de chômage à l’usage de leurs adhérents.

En 1908, en 1909, en 1910, en 1911, Syndicats de Toulouse bataillent pour, à la fois, augmenter les salaires et diminuer les heures de travail. Ce sont les Syndicats du bâtiment qui agissent le plus. Les Syndicats du bâtiment donnèrent le branle et déterminèrent le mouvement pour la diminution des heures de travail. Dans le bâtiment, la grève des menuisiers du 22 avril au 18 juillet 1912, au cours de laquelle des soupes communistes furent organisées, se termina par une augmentation de salaire et l’abolition du travail aux pièces dans cette corporation. Ce fut une victoire. Mais certaines corporation des autres industries agirent également de 1908 à 1911, telles que les boulangers et cuisiner, et obtinrent des résultats.

A cette époque d’avant-guerre, se tenait à la Bourse du Travail de Toulouse, les 25 et 26 décembre 1909, le Congrès des organisations syndicales de la région du Midi avec 72 organisations, 1 fédération( les Agricoles du Midi), 13 Bourses du Travail et toutes rassemblant 101 délégués.

Les années 1908, 1909, 19010 furent, dans le mouvement ouvrier syndical toulousain, des années de pensée ardente, de lutte intense, de solidarité très large, de combat développé. Ce fut le Midi en grève chez les délaineurs, les mégissiers, les chapeliers, les mineurs et les charretiers, les viticulteurs avec ces sommets de lutte : Mazamet, Graulhet, Espéraza, Salsigne, Porté, l’Hospitalet, Ginesta, Moussan ; avec ce centre de rayonnement : Toulouse dont les délégués de la Bourse du Travail se trouvaient à la fois à Carcassonne, à Narbonne, à Castres, à Albi, à Tarbes, à Castelnaudary, à Foix, à Pamiers, à Montauban, avec ces départements entraînés dans l’action syndicale de plus en plus étendue ; la Haute-Garonne, le Tarn, le Tarn-et-Garonne, l’Ariège, les Hautes-Pyrénées, le Tarn, l’Aude, l’Aveyron ; avec l’exode des enfants des grévistes et la misère sociale grondant partout, faisant naître des soulèvements partiel et faisant surgir des convictions nouvelles à Graulhet, Mazamet, Salsigne, Labassère, Lavelanet, Banière-de-Bigorre, Luchon, Calabre, l’Hospitalet, Saint-Suplice-de-la-Pointe, Gaillac, Decazeville, Castelsarrasin et le Bassin d’Aubin.

En 1912, les syndicats de l’Habillement firent une active propagande pour la réduction des heures de travail, une question se greffa sur ces préoccupations : le travail à domicile. La campagne ouverte à cette époque par la C.G.T. pour la diminution des heures de travail et l’application du principe de la semaine anglaise, fut accueillie avec joie par les syndicats toulousains qui avaient après tout lutté pendant des années pour cette réforme d’une importance capitale.

Dans la matinée du dimanche 13 avril 1913, la Bourse du Travail de Toulouse, se tint le Congrès constitutif qui transforma l’Union des Syndicats ouvriers de Toulouse et de la région en Union Départementale des Syndicats de la Haute-Garonne.

La guerre vint, qui gêna, qui dispersa l’organisation ouvrière. Au 1er août 1914, il existait 48 syndicats et une jeunesse syndicaliste. Durant les années1915, 1916, 1917, 1918 et jusqu’en janvier 1919, l’organisation de 23 syndicats, parmi lesquels travailleurs des Services publics, de l’Etat, du Bâtiment, de l’Habillement, fut maintenue à la Bourse du Travail de Toulouse, grâce aux efforts de François Bousquet, son secrétaire.

Ces syndicats furent représentés en 1917 à la Conférence confédérale de Clermont-Ferrand et au Congrès confédéral de Paris 1918. On comptait en août 1919 : 56 syndicats et la jeunesse, parmi lesquels le Syndicat de l’Eclairage et des Forces motrices( Gaz, Electricité, moteurs, appareilleurs) et le Syndicat général du personnel ouvrier des Omnibus et Tramways. Ces deux syndicats, avant la guerre, n’avaient jamais pu se constituer à Toulouse.

Du 18 décembre 1918, date de l’arrivée de Marty-Rollan, secrétaire de l’Union départementale, à Toulouse, venant des armées, en permission libérable( Marty-Rollan parti en août 1914, fut démobilisé le 21 janvier 1919), au 8 février 1919, fut une période où l’on s’occupa du personnel licencié des usines de guerre, où l’on créa un comité d’embauchage, une caisse de chômage, où il fut beaucoup question de réorganisation industrielle. On s’agita sans rien créer. L’action de l’Union départementale eut pour objet de faire obtenir du travail et des indemnités de chômage aux ouvrières des usines de guerre licenciées qui ne trouvaient plus à s’embaucher. Toulouse n’ayant jamais été une ville industrielle qui aurait pu absorber dans ses ateliers, chantiers et usines. La municipalité toulousaine et la Bourse du Travail présentèrent aux pouvoirs publics différents rapports examinant la possibilité de transformer certains ateliers de l’Etat, organisés pendant la guerre : en fabrique d’engrais, de produits chimiques, d’objets divers permettant l’emploi de la main-d’œuvre féminine. L’Etat accueilli favorablement ces rapports mais ne réalisa rien à l’époque. Il préféra verser des sommes importantes au fonds de chômage : plus de deux millions furent dépensés par la ville de Toulouse, le département de la Haute-Garonne, l’Etat. Rien ne fut modifié. La situation du travail resta la même : pas d’usines transformées, à peine une indication d’amélioration pour un avenir plutôt lointain. Au fond, les militants syndicalistes se sont trop laissé absorber dans une propagande stérile pour donner satisfaction à l’égoïsme individuel. Sans profit réel, on a soulagé momentanément des misères, mais sans faire surgir aucune source de bien-être, sans créer aucun travail : rien de durable n’a été fait à ce moment.

En 1919, la Bourse du Travail de Toulouse liée étroitement à l’Union Départementale de la Haute-Garonne, dirigeait brillamment et conduisait au succès des grèves énergiques qui affectèrent dix-sept corporations. Parmi ces grèves, les plus retentissantes furent ; du 9 au 22 juillet, la grève dans l’alimentation. On aura toujours le souvenir à Toulouse du 14 juillet où les fêtes officielles se ressentirent grandement de l’absence au travail de la totalité des ouvriers et ouvrières boulangers, cuisiniers, garçons de café, d’hôtels, de restaurants. Tout était fermé. Du 16 novembre au 7 décembre, grève dans la couture et la mode. Du 24 novembre au 29 décembre, grève dans les manufactures de chaussures. Les 13,14, 15 juin, grève des ouvriers du Gaz et de l’Electricité, affectant d’une façon complète le personnel de l’Usine à Gaz, des usines du Bazacle, de la Pyrénéenne et toutes les maisons d’appareillage. Pendant quatre jours, Toulouse et la région toulousaine furent privées de lumière et de force motrice. Il y eut aussi la grève des Tramways. Avec les cheminots en 1920, la plupart de ces corporations se trouvèrent en grève.

Après le crime de guerre, vint le crime de la scission ouvrière. La démagogie communiste n’entama pas ou si peu, la forteresse syndicale toulousaine. Voici le relevé des syndiqués (tous adhérents nouveaux ou jeunes) qui quittèrent la vieille C.G.T. pour constituer une union locale adhérente à la C.G.T.U. Cheminots, 50 ; Métaux et Similaires( d’une seule maison), 60 ; Charpentiers, 11 ; Menuisiers en bâtiment, 7 ; Colleurs de papiers peints, 37 ; Transports, 2 ; Chaussures, cuirs et peaux, 4 ; Enseignement 5. En tout, 180, sur prés de 18.000 adhérents. A l’heure présente, aux jours que nous vivons, les unitaires en sont restés à la même proportion. Mais la hurle démagogique s’accroche toujours à Toulouse sans obtenir de résultats.

Des cheminots et des colleurs de papiers peints unitaires se réclament de la neutralité municipale, émirent la prétention de se réunir à la Bourse du Travail, immeuble confié aux organisations ouvrières par la Municipalité. Mais par une décision du 6 mars 1922, le Conseil d’administration leur avait répondu par avance. Voici la décision :

Extrait du Conseil d’administration du 6 mars 1922 :

« Le camarade Cazeneuve, secrétaire de la Bourse du Travail, fait connaître la situation des syndicats adhérents. A ce sujet, sur une intervention des camarades Petrat, Vedeau, Bedel ; le Conseil estime que les syndicats qui s’organisent en Union locale unitaire, n’étant au fond et exactement que des syndicats politiques agissent sous les directives d’un parti politique ; ne peuvent avoir aucun droit de se réunir à la Bourse du Travail, place Saint-Sernin.. Et cela, parce que notre Bourse du Travail s’efforce de réaliser l’entente ouvrière dans la poursuite des réformes corporatives et au-dessus et en dehors de toutes opinions politiques, philosophiques, religieuses. En conséquence, le Conseil décide, suivant en cela ses principes toujours respectés, que tout syndicat non confédéré ne sera admis à la Bourse du Travail. Le Conseil ajoute que cette décision ferme devra être présentée à l’Union qui devra être la sienne. Cette décision ne sera soumise à l’Administration municipale par voie de délégation, que si l’obligation nous en est faite par une demande à la Municipalité des syndicats divisionnistes, de se réunir à la Bourse du Travail. »

Cette décision fut ratifiée par l’U.D. le 8 mars et l’Administration municipale la jugea bien fondée et conforme à la logique. A aucun moment, les syndicats unitaires n’ont pu établir leur siège à la Bourse du Travail. D’ailleurs, les syndicats confédérés étaient bien décidés à abandonner cet immeuble, si par impossible les unitaires avaient pu s’y installer. Et leur résolution que l’on savait ferme et valable était bien connue, malgré que depuis de nombreuses années ils ne cessaient de demander l’agrandissement des locaux devenus par trop restreints en raison de l’extension des divers services intérieurs et du développement toujours croissant des organismes syndicaux. Et c’est ainsi que le premier rapport de construction de l’immeuble actuel fut présenté par le citoyen Granier et approuvé à la séance du Conseil municipal, le 15 février 1928.

Quatorze mois après(le 13 avril 1929), avait lieu la pose de la première pierre. A cette occasion, le citoyen Billières, maire de la ville, prononçait, dans un passage de son discours, les paroles, suivantes : Le Conseil municipal qui a doté Toulouse de logements confortables se devait de témoigner sa sollicitude toute particulière aux travailleurs en leur donnant une Bourse du Travail digne d’eux. »

La promesse fût réalisée, et le dimanche 10 mai 1931, l’immeuble actuel remis officiellement par la Municipalité à la garde des Syndicats confédérés, permettant ainsi à ces derniers l’organisation d’un meilleur aménagement, plus clair, plus vaste, et plus propre de tous les syndicaux, incorporant en outre dans leur sein les services de la Caisse d’assurances sociales « Le Travail », dont la loi ordonnait le fonctionnement à dater du 1er juillet 1930.

A l’occasion de cette solennité, un grand banquet où prirent place plus de 400 convives fût servi dans la grande salle de l’Eldorado.

La présidence en fut offerte à notre camarade Léon Jouhaux, Secrétaire général de la C.G.T., et au citoyen Billières, maire de Toulouse, ayant à leurs côtés les citoyens Bedouce et Vincent-Auriol, députés, le camarade Marty-Rollan, secrétaire adjoint de la C.G.T.,les délégués des U.D. voisines, le Conseil municipal en entier, plusieurs secrétaires de Fédérations,, le bureau et le Conseil d’administration de la Bourse du Travail, les délégués de tous les Syndicats adhérents à l’Union de la Haute-Garonne, le vétéran Aristide Passerieu, Me Milhaud, avocat-conseil, Taverne, président du Conseil des Prud’hommes et bien d’autres qui voudront bien nous excuser de ne pas les nommer.

Enfin, pour consacrer ce nouvel édifice, une plaque de marbre fut apposée dans le hall d’entrée, sur laquelle est gravée l’inscription suivante :

« La construction de la Bourse du Travail a été décidée par le Conseil municipal socialiste en séance du 15 février 1928.

MM ; Etienne BILLIERES, Maire de Toulouse ; Félix LAVIT, adjoint délégué aux Travaux ; Louis TACHE, adjoint délégué au Travail ; MM. Louis CAZENEUVE, Secrétaire général de la Bourse du Travail ; Julien FORGUES, Secrétaire de l’Union des Syndicats Omer BEDEL, Trésorier de la Bourse du Travail ; Et les membres du Conseil d’administration. Les plans dressés par M.MONTARIOL, architecte de la Ville.

Les travaux ont été confiés à la Société coopérative ouvrière « Les Charpentiers Toulousain ». Paul BARTHE, Directeur. »

En terminant, formons le vœu que tous les toulousains aient conscience nette et restent fidèles à notre C.G.T. qui fera toujours son devoir d’animatrice pour l’émancipation de la classe ouvrière, par le syndicalisme qui conduit l’humanité.

MARS 1934

FONDATEURS MILITANTS SECRETAIRES DE LA BOURSE DU TRAVAIL

Piquepé (sculpteur ornemaniste), 1890-1892 ; Moitel (peintre en bâtiment, 1893). Marius Pinel(ébéniste), 1894-1896 ; François Bousquet ( maçon), 1894-1896 ; .François Bousquet mourut le 26 avril 1920, il fut remplacé par Louis Cazeneuve( menuisier en bâtiment), actuellement en fonction.

SECRETAIRES DE L’UNION DES SYNDICATS

Valat (tailleur de pierres), secrétaire général, avec secrétaire adjoint Pradelle( tourneur sur bois), 1890-1891 ; Courtois(métallurgiste), 1892 ; Baylac, 1893 ; Tranier (tailleur d’habits), 1892 ; Carol, 1895 ; Bouat(colleur de papier), 1896 ; Claustres, 1897 ; J.A.Blanc(manœuvre, homme de peine), 1898-1902 ; Paillas(magasins administratifs de la guerre) 1902-1906 ; Marty-Rollan(employé), 1906-1923. Marty-Rollan, désigné par le Comité Confédéral National de février 1923 délégué permanent à la propagande de la C.G.T., en résidence à Paris, fut remplacé par Julien Forgues, actuellement en fonction.

TRESORIERS DE LA BOURSE DU TRAVAIL ET DE L’UNION DES SYNDICATS

Barlan(Tabacs), Raymond(Livre), Hackemberger(coupeurs-chemisiers) tous trois décédés. Omer Bedel( Poudrerie)n actuellement en fonction depuis 1911.

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Note de Georges Portalès :

Ces textes sont la reprise intégrale de la brochure Historique de la Bourse du Travail de Toulouse- 1878-1934, que l’on peut consulter aux Archives Municipales : sous la référence B 3542 . Cette brochure est assortie de vingt-sept photographies qui représentent les activités de la Bourse du Travail durant cette période.

Toulouse le 20 septembre 2009